Depuis la première réunion de notre Assemblée à Strasbourg, nous avons
marqué une double préoccupation : établir des liens intimes entre nos
institutions tout en ne les confondant pas. En effet, nos institutions sont
de nature différente : le Conseil de l'Europe est fondé sur la notion de
souveraineté nationale, la Communauté du Charbon et de l'Acier, au
contraire, est fondée sur la notion nouvelle de fusion des souverainetés. La
Communauté est une entité nouvelle et souveraine. La Haute Autorité est
l'exécutif de cette Communauté. L'Assemblée de cette Communauté du Charbon
et de l'Acier est souveraine, au même titre que les parlements nationaux
dans un domaine plus large. Notre Communauté ne se développera bien que si
toutes les mesures qu'elle prend sont rendues publiques, expliquées
publiquement, non seulement aux peuples de notre Communauté, mais aux
peuples qui n'en font pas partie. C'est particulièrement le cas des pays
membres du Conseil de l'Europe.
Je tiens à dire que notre Communauté n'est ni une petite Europe, ni
une Communauté restreinte. Ses limites n'en sont pas fixées par nous. Elles
sont fixées par les pays mêmes qui, pour le moment, ne s'y joignent pas. Il
ne tient qu'à eux que nos limites en soient étendues et que les barrières
qui séparent nos pays d'Europe, et dont l'ambition de la Communauté du
Charbon et de l'acier est de commencer l'élimination, soient
progressivement, et d'une manière plus large encore, abolies.
(Commission des Affaires économiques de l'Assemblée consultative du
Conseil de l'Europe, Strasbourg, 28 mars 1953.)