POSITION DU PROBLÈME POLITIQUE. - PRINCIPE DE
SOLUTION
Si le lecteur a suivi avec quelque diligence l'exposition qui précède, la
société humaine doit lui apparaître comme une création fantastique, pleine
d'étonnements et de mystères. Rappelons-en brièvement les différents termes:
L'ordre politique repose sur deux principes connexes, opposés et
irréductibles : l'Autorité et la Liberté.
De ces deux principes se déduisent parallèlement deux régimes
contraires : le régime absolutiste ou autoritaire, et le régime libéral.
Les formes de ces deux régimes sont aussi différentes entre elles,
incompatibles et inconciliables que leurs natures ; nous les avons
définies en deux mots Indivision et Séparation.
Or, la raison indique que toute théorie doit se dérouler suivant son
principe, toute existence se produire selon sa loi : la logique est la
condition de la vie comme de la pensée. Mais c'est justement le contraire
qui se manifeste en politique : ni l'Autorité ni la Liberté ne peuvent se
constituer à part, donner lieu à un système qui soit exclusivement propre
à chacune ; loin de là, elles sont condamnées, dans leurs établissements
respectifs, à se faire de perpétuels et mutuels emprunts.
La conséquence est que la fidélité aux principes n'existant en
politique que dans l'idéal, la pratique devant subir des transactions de
toutes sortes, le gouvernement se réduit, en dernière analyse, malgré la
meilleure volonté et toute la vertu du monde, à une création hybride,
équivoque, à une promiscuité de régimes que la logique sévère répudie, et
devant laquelle recule la bonne foi. Aucun gouvernement n'échappe à cette
contradiction.
Conclusion : l'arbitraire entrant fatalement dans la politique, la
corruption devient bientôt l'âme du pouvoir, et la société est entraînée,
sans repos ni merci, sur la pente sans fin des révolutions.